Le peintre d'art sacré

 


Xavier de LANGLAIS (1906-1975)


Les taolennoù, tableaux en breton, ont été imaginés au XVIIème siècle par le père Michel Le Noblez pour accompagner les missionnaires dans leurs prédications dans les paroisses. Les images qu'ils apportent aident à faire assimiler la prédication en représentant à la fois l'être humain et l'âme. Ils doivent les aider à choisir le bon chemin qui les mènera au Paradis.

Ces tableaux ont été beaucoup utilisés en Bretagne et spécialement dans la partie parlant breton. Plusieurs ordres les ont utilisés dont :

- Les Capucins. Une troisième branche des Franciscains crée sous le Pape Paul III en 1525. - Les Monfortains, ordre créé par Louis-Marie Grignon de Monfort vers 1700 et résidant aujourd'hui à Saint-Laurent-sur-Sèvres en Vendée.
Catherine de Francheville, sœur d'un de ses ancêtre, avait fondé à Vannes une maison de retraite pour les femmes au XVIIème siècle, utilisait, comme cela se faisait à l'époque, 12 tableaux représentant le combat de l'âme entre le bien et le mal pour convertir les âmes. Au début du XXème siècle la série des taolennoù se réduit à 7 tableaux, un par jour.

La dimension des taolennoù a évoluée, trop petits à l'origine pour être vus par tous les paroissiens, ils ont atteint ensuite les dimensions de 2m 20 sur 1m 70. Ils sont peints sur des toiles enroulées sur une hampe en bois de façon à pouvoir être transportés facilement. Le missionnaire a ainsi une série de 4 à 5 taolennoù, un par jour pour accompagner sa prédication.
À la veille de la production des taolennoù par Xavier de Langlais, on constate une évolution de la représentation des animaux telle que l'avait faite par le jésuite Vincent Huby : l'animal représentait le péché !


Le péché mortel, extrait de "Taolennou ar mission"

Un Monfortain, le Père Jean-Louis Rozec, en 1936 dans sa publication "Mellezour an eou" – "Le miroir de l'âme" écrit : dans les tableaux on trouve une tête et un cœur. La tête représente le corps, le cœur l'âme. Les signes symboliques des péchés et des vertus, placés à l'intérieur du cœur, sont expliqués dans les sujets qui l'entourent. L'étoile de la Foi sera ou obscure ou brillante, l'œil de la conscience sera ou ouvert ou fermé, selon l'état de l'âme elle-même.

Ainsi Xavier de Langlais évoque dans son journal les taolennoù :

- Le 5 avril 1935 : "J'ai trouvé une lettre curieuse… Un missionnaire (le Père Rozec) me demande des "Tableaux de mission" représentant les péchés capitaux, la route du Ciel et de l'enfer… Le programme symbolique m'est d'ailleurs imposé par le menu…"
- Le 21 avril 1935 : "J'ai achevé les esquisses très réduites de mes tableaux de mission".
- Le 10 septembre 1935 : "J'ai commencé hier les tableaux du Père Rozec. Le sujet me plait infiniment". Mais il y a une restriction : "Les scènes qui symbolisent les vices et les vertus ne sont pas toujours choisies avec un bonheur égal".
- Le 14 septembre 1935 : Il a commencé l'agrandissement à ¼ de la grandeur des panneaux de Mission.
- Puis il prépare la toile.
- Il peindra légèrement pour éviter des craquelures au roulage et au déroulage.
- Le 30 octobre 1935 : Il a achevé les maquettes.
Malheureusement, il doit suspendre son travail car il a d'autres engagements à respecter. Ce n'est qu'en juillet 1936 qu'il finira ses taolennoù pour le Père Rozec. Il lui aura fallu plus d'un an.

Le 28 avril 1945 : Il note dans son journal "J'ai achevé une série de 5 tableaux de mission pour le Père Rozec. Sujet classique comme la première série que j'avais peinte en 1936". Cette seconde série servira à un autre Monfortain pour être utilisée dans le même esprit.
On est après la guerre et c'est sur des draps recousus qu'il a dû peindre !

En 1946, une troisième série de taolennoù va être peinte par Xavier de Langlais, mais pour un Capucin le Père Médard (Jacques-Marie Dourmap). La philosophie n'est plus la même : l'amour prend plus d'importance que la crainte. Les tableaux sont moins surchargés. Ils ne sont que quatre tableaux.
C'est la fin de la période d'usage de ces taolennoù, ils seront malheureusement peu utilisés mais cela permettra de les conserver dans un état correct.


             Tugdual de Langlais