Présentation de l'église Notre Dame de Victoire le 24 mai 2019
siège de la paroisse Saint-Louis à Lorient
par Rozenn de Collart

Chers amis,

Tout d’abord je remercie le Pére Jean-Eudes Fresneau, curé de la paroisse de nous accueillir dans son église. J’ai donc le plaisir de vous présenter l’église Saint Louis Notre Dame de Victoire Nous sommes dans un édifice construit en 1955, l’église Saint Louis tel que les Lorientais l’ont connue avant la guerre avait été érigée entre 1810 et 1830, elle était d’un style néoclassique qui rappelait l’église de la Madeleine à Paris. Elle a subi de nombreuses transformations à travers les siècles puisque déjà elle existait au début du XVIIe siècle et c’est Louis XIV qui avait expressément demandé que la paroisse porte le nom de son Saint patron. Après les terribles bombardements début 1943 l’église a été détruite, seule reste alors dans le chœur, malgré sa fragilité, la statue de la Vierge Notre Dame de Victoire. Celle-ci était déjà vénérée par les Lorientais depuis qu’elle avait sauvé et protégé la ville au moment du siège des Anglais en 1746. Il fut alors décidé de reconstruire l’église au centre de la ville mais celle-ci sera déplacée de 400m et érigée place Alsace Lorraine par l’architecte Jean Baptiste HOURLIER en 1955.
Comme vous pouvez le constater, la réalisation est volontairement moderne tant à l’extérieur qu’à l’intérieur, utilisant le béton et toutes les possibilités qu’il permet. Le fascicule qui se trouve à l’entrée mentionne, je cite « toute la composition de l’édifice témoigne de l’aspiration à l’élévation. » L’église a été livrée au culte avec seulement le chemin de croix, ce n’est qu’en 1959 que divers artistes ont été appelés à décorer l’ensemble du bâtiment. Sous la coupole qui éclaire le chœur, il y a la fresque du « couronnement de la vierge » de Nicolas Pierre INTERSTELLER, artiste peintre parisien. Celui-ci a également décoré le nouvel Hôtel de Ville de Lorient à la même époque, sous les directives du même architecte. Cet artiste connu comme grand prix de Rome et directeur de l’école des beaux-arts de Paris a réalisé ici une grande fresque sur ciment sec peint à l’huile, procédé très différent de celui que Xavier de LANGLAIS a utilisé, c’est dire une fresque sur enduit frais à la « fresco » comme les réalisait les grands peintres italiens. Tugdual de Langlais vous en a décrit plus longuement le procédé à Étel. On remarquera les couleurs pastelles très discrètes et les lignes sobres de l’œuvre qui n’écrasent pas l’édifice malgré sa taille. Henri JOUBIOUX, peintre breton se voit confier les deux fresques latérales, elles sont réalisées sur ciment brut avec une peinture à la cire. D’un côté une émouvante Piéta, de l’autre l’Annonciation. Les lignes sobres et pures s’harmonisent avec le caractère dépouillé, voir un peu froid du monument et de la décoration centrale. Chacun ayant à cœur de s’harmoniser, sans dominer l’autre dans un grand respect de la personnalité mutuelle. Dans le fond de l’église on peut aussi regarder la décoration des fonds baptismaux par le peintre et graveur BEAUFRERE, lui aussi artiste breton. Compte tenu de son emplacement il n’a pas eu les mêmes contraintes que ses confrères quant à la composition et les couleurs, cette peinture évoque la genèse et les origines du monde.

De même Xavier de LANGLAIS a pu laisser libre cours à son inspiration puisqu’il lui a été confié la décoration des chapelles latérales. À première vue cela peut paraître dommage, car elles ne sont pas les premières œuvres qui s’offrent à nos yeux, mais en y réfléchissant bien et avec le temps.
Quel bonheur de pouvoir honorer Saint Louis, patron de cette paroisse et accueillir dans cette chapelle, la très belle statue de Notre Dame de Victoire. Elle n’était pas à cet emplacement au moment de la réalisation de la décoration ce qui explique la gêne qu’on éprouve pour apprécier la perspective dans sa totalité. Pour la fresque du Sacré-Cœur, là encore au moment de l’exécution, cette chapelle n’avait pas le privilège de recevoir la présence réelle, c’est en 1965 qu’elle fut transformée en chapelle du Saint-Sacrement, lieu de prière et de recueillement par excellence Nous pouvons maintenant nous diriger vers la chapelle de Saint Louis à votre droite.

Avant de passer au détail de la fresque vous pouvez admirer cette belle vierge qui date de 1850, elle remplace celle en argent qui a disparue pendant la révolution. La vierge trônait sur les remparts de la ville qu’elle a su si bien protéger, elle présente son fils qui porte un rameau d’olivier symbole de la paix, et de son sceptre elle écarte le léopard britannique.

En arrivant dans cette chapelle nous sommes étonnés par le style dépouillé, moderne et symbolique, peu habituel chez Xavier de LANGLAIS. Volontairement il a voulu se singulariser par des couleurs très vives pour égayer ce fond de monument peu éclairé par la lumière naturelle.

La légende inscrite sur la fresque «Saint Louis sergent du Christ et apaiseur, protégez nous» résume le message que l’artiste veux nous donner avec cette décoration, c’est à dire nous transmettre la Foi de ce grand roi courageux et téméraire. Il s'embarque courageusement sur sa nef les voiles gonflées par le vent sur une mer pleine de difficultés, houleuse même voir hostile à en juger par sa couleur. Il se dirige vers l’Orient la terre sainte. Ce grand soleil lumineux est plein de promesse et d’espoir pour sauver la chrétienté et Jérusalem. au centre sur l’écu sombre du chevalier, la croix du Christ en rouge sur fond brun, symbole le plus marquant puisque cette croix insubmersible émerge de la mer comme pour bien nous rappeler le but de son départ en croisade. Nous pouvons aussi remarquer. la présence d’un poisson signe des premiers chrétiens auxquels il va porter secours. De chaque côté vous avez les symboles de sa royauté la couronne et le sceptre qui lui ont été confiés par Dieu le jour de son Sacre. Et pour terminer, sur le côté nous avons l’épée du croisé "sergent du Christ ayant dans son cœur la mission d’apaiser les peuples". Malheureusement après 6 ans de souffrances. son épopée se termine comme nous le savons par sa capture et sa mise en prison figurée ici par une chaîne et une corde. Maintenant que vous avez les clés de ces symboles. Comme dans les œuvres précédentes nous avons retrouvé des esquisses préparatoires de ces deux réalisations, je les ai tiré sur papier pour que vous puissiez les voir sur place. Merci de bien vouloir les faire passer. Tugdual vous les remontrera avec son Powerpoint à Plœmeur mais déjà vous pouvez constater qu’on retrouve les mêmes symboles dans des compositions et des couleurs différentes.
Nous pouvons maintenant nous diriger vers la Chapelle du Saint-Sacrement à Gauche de l’autel principal, Je vous laisse quelques instants pour contempler cette deuxième fresque bien différente de la première, c’est une harmonie de couleurs vive et chaleureuse incitant au recueillement. Tout d’abord on est impressionné et attiré par ce feu purificateur qui domine le centre de la composition avec ces superbes flammes jaillissantes blanches, évoquant la pureté du cœur, il éclaire le ciel rouge symbole de l’amour de Dieu. Ces flammes ressortent sur le globe terrestre noir qui fait penser à la guerre encore si proche dans tous les esprits. L’artiste a volontairement voulu nous faire passer ce message en inscrivant à droite "Cœur sacré de Jésus notre paix et notre réconciliation". L’autre élément décoratif de cette fresque est représenté par le Cœur sacré de Jésus d’où éclate la vie l’espérance et le renouveau avec cette branche harmonieuse de rosier, petit clin d’œil personnel de l’artiste qui représente ici ses 4 enfants, sous la forme de la rose héraldique des Langlais. À gauche, la couronne d’épine évocation du sacrifice de la croix comme nous dit Saint Jean "il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime" (jn 15,13) Au-dessus l’olivier, arbre de vie et d’espérance et pour terminer la colombe de la paix avec son rameau d’olivier. Je veux quand même vous faire remarquer sur le côté ce ruban tressé, qui a aiguisé ma curiosité, j’ai trouvé une explication qui me semble bien correspondre à cette évocation "Tous ceux qui prêchent lisent ou chantent forment un ruban car ils rassemblent dans la paix et la concorde et ils font résonner les membres les uns avec les autres dans l’harmonie de la foi et de l’amour".

La présentation que je vous ai faite de ces deux fresques j’espère ne trahit pas l’esprit dans lequel notre père les a créés. Dans mes souvenirs d’enfance je me souviens de son enthousiasme pour cette création nouvelle. N’ayant pas retrouvé de note à ce sujet dans son journal d’artiste je veux quand même vous faire partager une note de ce journal datant de cette époque. Il écrivait en 1956 : « De plus en plus je suis passionné par ce magnifique métier qui est le mien (le métier de peintre) ! Littéralement je n’en dors plus. Je me couche le soir en désirant être déjà au lendemain. Et le lendemain je me réveille (bien avant l’aube) en me disant aujourd’hui je vais peindre ! J’éprouve toujours le même émerveillement devant un mur blanc ou une feuille de papier vierge. J’éprouve toujours la même joie physique à préparer mes tons sur ma palette avant de poser «la première touche de la journée » et chaque jour je loue et remercie Dieu pour m’avoir accordé ce don de création qui me dispense à la fois tant d’inquiétude et tant de joie !"

Rozenn de Collart

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