Marie-Étienne ou Étienne PELTIER

( 1762 -
1807 )

En attendant de pouvoir lui reconstituer "un visage",
voici:
ses
états de services:
d'après le lettre du conservateur,
Direction des archives de France - Archives Nationales - Section Outre-Mer à Gaëtan de Langlais.

ses périples.

et l'histoire de la
"prise de L'Elisa" à la quelle il participa.


extrait d' une lettre de lui datée de Paramaribo (Surinam) du 25 nivôse de l'an VI (14 janvier 1798), l'ensemble des lettres relatant son périple sont parues dans la Feuille Nantaise du 4 prairial an VI (23 mai 1798), consultable à la Médiathèque de la ville de Nantes.


La vie de Marie-Étienne PELTIER a fait l'objet d'un livre paru en décembre 2017 aux Éditions Coiffard, 240 pages, illustrations en couleurs :
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Marie-Étienne Peltier, capitaine corsaire de la République


Marie-Étienne, est né en Anjou à Gonnord le 6 janvier 1762, comme son frère Jean-Gabriel Peltier. Ayant été élevé à Nantes, il se sentait Breton ce que confirmait son insciption à l'Amirauté de Nantes ! ce qui ne facilite pas les recherches généalogiques... Après de solides études, ce grand gaillard pour l'époque (1m75) s'embarqua sur des navires de commerce, comme passager pour son premier voyage à Saint-Domingue. Au retour sur le Judicieux, ils sont capturés par les Anglais le 3 octobre 1778, la France vient de reconnaître l'indépendance des États-Unis. Il fait ensuite un voyage à la Martinique.

En 1781 on trouve son nom sur le rôle de la Jeune Héloîse, bateau de l'armement familial (Peltier Dudoyer, Carier), en partance pour le Cap de Bonne-Espérance où le convoi doit déposer la Légion du Luxembourg en renfort des Hollanais. Mais, à Brest, son cousin Nicolas Baudin perd le commandement de l'Appollon, ils décident d'abandonner le voyage.

En 1782 Marie-Étienne avait déja effectué une campagne et 4 voyages, quand il repart sur la Bienfaisance pour les Antilles et Saint-Domingue.

L'année se termine quand il embarque sur la flûte du Roi La Ménagère, prêtée à Beaumarchais, et commandée par Jérôme de Foligné. Les trois bateaux ont à peine quitté Bordeaux que le convoi est attaqué par le Médiator. Seule l'Aimable Eugénie, commandée par Nicolas Baudin réussit à s'échapper et atteindre Saint-Domingue. Deux mois après Marie-Étienne est libéré. Cette "bataille navalle" d'un navire de guerre contre des navires de commerce sera commémorée par un tableau.


L'Alexandre - le Mediator - la Ménagère - l'Aimable Eugénie - Le Dauphin Royal - un brigantin américain à la sortie de la Gironde. © National Museum, Greenwich Museum, London.

En 1784 il embarque à 22 ans sur le Saint Rémy, armé de 4 canons et allant à Saint-Marc et au Port-au-Prince (Saint-Domingue). Et en 1785 à 23 ans, il va naviguer sur un des navires mythiques pour les Acadiens de Louisiane : le Saint-Rémy, commandé par Alexandre Baudin, et le Bon Papa où il est second Capitaine, allant à Saint-Marc en passant par la Louisiane, pour y emmener des derniers Acadiens à la demande du roi Charles III d'Espagne.  Nicolas Baudin fait partie de la même expédition, il commande la Caroline. Rendus à la Nouvelle-Orléans, Nicolas quitte son commandement et part pour de nouvelles aventures (dont la découverte des côtes australiennes), et Marie-Étienne vend le Bon Papa, comme son père lui en avait donné le pouvoir, mais utilise l'argent pour acheter une habitaition qu'il revend un mois après !

Suit une période de 10 ans dont nous ne savons rien à ce jour, le "Matricule des volontaires sur les bâtiments marchands" aux Archives Départemetales de Loire-Atlantique indique laconiquement: "1788, sans nouvelle"... .

Pendant la Révolution la plus part des navires furent armés "en course", son père Jean Peltier-Dudoyer, ayant déjà armé en 1779 un bateau corsaire le Zéphir pour accompagner les transports d'armes aux "Insurgent" et le Lion pour le compte des Américains, il n'est pas étonnant que Marie-Étienne réapparaisse en 1795, il a 33 ans, comme officier sur L'Égalité, bateau corsaire de Charleston - USA. Il a droit à 8 parts, comme capitaine, lors de la prise du brigantin Everton, vendu à Charleston (Caroline du Sud) le 20 juin 1795. Une des 20 prises ramenées par lui pendant son séjour aux États-Unis.

- puis le 2 décembre 1796 (en l'An V), il commande L'Aventure, bateau corsaire de 16 canons, 65 hommes d'équipage, armé à Calais. Le voyage est de courte duré, ils sont capturés le 19 décembre, sans avoir fait de prise. C'est sa quatrième captivité.

Ponton anglais En effet, il avait été fait prisonnier une autre fois par les Anglais en voulant se rendre en Guyane le 8 mars 1796 (en l'An IV), il avait été gardé pendant 3 mois.

Contrairement à d'autres, il ne goûte pas aux pontons, sans doute grâce à son frère Jean-Gabriel qui a émigré à Londres, et est employé au Foreign Office ! Il sera l'objet d'échanges, car il ne faut pas confondre pirate et corsaire, les corsaires en cas de capture étaient considérés comme prisonniers de guerre. Les échanges se faisaient alors homme pour homme, grade pour grade et étaient l'objet d'un "cartel d'échange" préétabli.


- Le 2 novembre 1797, il embarque, comme capitaine en second puis devient capitaine sur le corsaire le Barbier de Séville, armateur Grelier de Nantes. Marie-Étienne pendant 4 mois va bourlinguer dans l'Atlantique-Sud, au cours de ce voyage il prend:
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L'Elisa
bateau anglais de Liverpool, armé de 16 canons, il est blessé lui-même au cours du combat et doit faire escale à Paramaribo (Surinam) pour faire soigner ses blessés.
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La Cecilia, trois mats anglais allant de Glasgow à Demarary, bateau que l'ennemi reprendra à Deguer, son premier lieutenant, quelques jours après,
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un 3 mats revendu à Guayra (Venezuela) pour payer la remise en état du Barbier de Séville et
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Le Larck brick anglais revendu par l'armateur Grelier à Santander (Espagne) en mai 1798.
C'est ce long voyage, fait de courage et de souffrance que la "Feuille Nantaise" relate à l'initiative de son armateur.

- Le 23 juillet 1798, à la suite de son courage pendant la prise de L'Elisa, par une lettre de l'Amiral E. Bruix, ministre de la Marine, il est autorisé à commander La Virginie portant 18 canons, appartenant au citoyen Basterrèche de Bayonne. Bateau qu'il n'a pas commandé, le projet ayant été abandonné.

- En décembre 1798, il est capitaine du corsaire de Bayonne Le Hussard, 20 canons, appartenant aux citoyens Basterrèche frères, avec lequel il entame un nouveau périple dans l'Atlantique. Il s'empare ainsi:
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le 7 janvier 1799 de la prise américaine La Carolina, trois mats armé de 10 canons, venant de Londres. On trouve une attestation à Ténérife, enrégistrant un acte de vente le 30 janvier 1799 de celle-ci entre le citoyen Marie-Étienne Peltier et Mr James Bary. Cette étonnante prise se passe pendant l'état de quasi-guerre entre la France et les États-Unis, à la même époque Surcouf dans l'Océan Indien s'empare également d'une prise américaine. La porise de Marie-Étienne va entrainer la déclaration de Quasi-War entre la Guyane et les USA par Étienne Laurent Burnel. 
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de la prise portugaise le Phaëton qu'il a amené le 4 mai 1799 en Guyane française.

Sans doute l'appat du gain pour revendre les cargaisons de ses prises, l'a attiré en Guyane hollandaise où il est bien accueilli par Jurian François de Friderici, le gouverneur. Mais apprenant sa présence le capitaine amaricain McNeil rejoint Paramaïbo et l'empêche de sortir du port, espérant se venger de la capture de la Carolina. C'est ignorer l'arrivée de l'escadre anglaise, commandée par l'amiral lord Seymou, venue s'emparer du Surinam. Mc Neil doit s'incliner et laisser aux Anglais le Hussard. Moyennant de l'or, il prend à son bord Marie-Étienne qui laisse son équipage entre les mains de son second, le capitaine Bernard Reliquet. Il pourra ainsi sauver des traites et porter ces documents au syndic des marins à Bordeaux.

Il a fait 29 prises ! malheureusement la dispersion de ces prises et de leurs lieux de ventes n'ont pas frappé les esprits, c'est ainsi qu'il est tombé dans l'oubli. Son prénom "Marie-Étienne" a du étonner, on le retrouve inscrit sous le nom d'Étienne-Marie ou d'Étienne, l'orthographe de son nom qui varie: Peltier, Pelletier ou Le Pelletier ne facilite pas le rapprochement de ses exploits. Enfin comment se souvenir de quelqu'un né dans une commune qui n'existe plus... Gonnord qui a fusionné pour devenir Valanjou puis Chemillé-en-Anjou.

Pendant la République, le Directoire et le Consulat il a mené ainsi une vie d'aventures de l'Amérique du Nord au Sud, des Antilles aux Canaries, séjournant à Nantes pendant ses escales, comme le prouve l'attestation du maire de Nantes du 25 mars 1802, document destinée à prouver qu'il n'avait pas un émigré.


Fanny PELTIER, née Rivière de la Souchère,
à la fin de sa vie
A 38 ans, il trouve un moment le 10 floréal an VIII (30 avril 1800) pour épouser à Paris une jeune fille de 20 ans : Anne Rivière-Souchère (ou Rivière de La Souchère), née à Saint-Domingue. De cette union naîtra à Paris le 6 pluviose an IX (26 janvier 1801) Marie, Françoise, Hipolitte Peltier qui deviendra "Fanny" de Langlais. Sur l'acte de naissance la profession du père est "propriétaire colon, ancien marin".

Les familles Peltier et Rivière devaient se connaître, ils avaient des amis communs les Archambault, on retrouve un Pierre Archambault, chirurgien sur le Saint-Rémy (Armement Peltier) en 1785 et un Jacques Archambault, capitaine de navire, au baptème de Sophie Jeanne Rivière le 14 décembre 1782.

On peut remarquer que peu après son mariage, en avril 1802, il fait faire des attestations de services qui sont déposées en vue de reconstituer sa carrière. Il est à un carrefour de sa vie, la Course étant suspendue par la paix d'Amiens, il repart à Saint-Domingue rejoindre son beau-père Jean-Baptiste Rivière de La Souchère, parti pour essayer de récupérer ses biens. Rendu sur place, il renoue avec la Course et arme l'Experiment à la fin de la paix d'Amiens, mais Saint-Domingue est instable, il préfère rentrer en France.

Il va être tenté par l'Océan Indien réputé plus calme et s'embarquer à Saint-Malo le 18 décembre 1804 sur le Napoléon, un navire armé par Robert Surcouf et son beau-frère Louis Blaize. Le bateau doit s'arrêter au Cap de Bonne-Espérance où il débarquera ses passagers pour faire la Course. Marie-Étienne est second lieutenant pour payer son passage et le capitaine est Malo Jean Le Nouvel. Tout semble bien se présenter.

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Le voyage ne se passe pas comme prévu. À la suite d'un litige avec le capitaine, Marie-Étienne est cassé à la tête de l'équipage et ne retrouvera jamais le droit de commander un navire. C'est donc comme passager qu'il va poursuivre ses voyages à l'Ile Bourbon (la Réunion), puis à l'Isle de France (Ile Maurice). Et finalement aux Indes danoises, à Trankebar, où réside son cousin Augustin Baudin. couleur
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Devenu "traitant" à Madadagascar, il s'installe à Fort-Dauphin puis à Foulpointe, où il décède empoisonné le 27 novembre 1807.

Repose-t-il dans un de ces cimetières cachés du peuple marin Vezo ou dans le cimetière des Pirates de l'île Sainte-Marie à Madagascar ?

Il laissa une famille dans la détresse, son beau-père qui était retourné à Saint-Domingue avec tous ses titres de propriétés, est mort de la fièvre jaune à Port-au-Prince en 1802 sans avoir pu récupérer ses biens. Aussi, faute de titres, sa fille n'a jamais pu être indemnisée ! Les Peltier ne sont pas mieux lotis : banqueroute et perte de leurs biens à Saint-Domingue... Son père Jean Peltier du Doyer et sa soeur Françoise meurent en 1803. C'est son beau-frère, l'armateur nantais François Michaud qui va essayer de gérer au mieux sur place, la succession et de s'occuper de sa nièce Fanny.

Signature de Fanny PELTIER (épouse de LANGLAIS) recueillie sur les lettres des Archives d'Outre-Mer à Aix.



tombeaux vezo dans le Sud de Madagascar

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Le livre :

Ce livre peut être commandé sur Internet, dans les librairies ou auprès de l'auteur.






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